François Mauguen (1880-1914) – le 1er des trois frères
François Corentin Marie Mauguen naît le 14 mai 1880 à Talagroas (Croix de Pellein), Kergoat, Quéménéven. Il est le fils aîné de François, cultivateur et bedeau, et de Marie Françoise Le Bihan.
Avec ses trois frères, il est mobilisé en août 1914. Un seul d’entre eux reviendra.
Avant guerre
Blond aux yeux bleus, il mesure 1,60 m et sait lire et écrire.
Ajourné pour faiblesse en 1901, François fait son service militaire de novembre 1902 à septembre 1904, dans la 10e compagnie du 3e bataillon du 130e régiment d’infanterie de Mayenne (matricule 2912 au recrutement de Brest-Châteaulin).
Il y obtient, en 1904, le certificat de bonne conduite que l’on peut voir ci-dessous.
En 1907, il accomplit une 1ère période d’exercice au 6e RIC de Brest, au cours de laquelle il est nommé caporal. Il accomplira une 2ème période en 1910.
En 1911, année du recensement, il est cultivateur à Talagroas avec son épouse, Jeanne Chapalain, leur fille Marie née en 1910, et son père François. Leur fils Jean naît à la fin de l’année 1911.
Quand la guerre éclate, il est mobilisé au 2e Régiment d’Infanterie Coloniale de Brest avec le grade de caporal. Il quitte probablement Brest le 8 août avec le 2ème RIC pour les environs de Bar-le-Duc dans la Meuse. Avec le 1er RIC, le 2ème RIC constitue la 1ère brigade d’infanterie coloniale, forte de près de 13 600 hommes, rattachée à la 3ème division d’infanterie coloniale.
Pendant la guerre
François est mobilisé le 11 août 1914 et rejoint le 2e régiment d’infanterie coloniale en tant que caporal. Le 2e RIC a quitté Brest le 8 août. On ne sait à quel moment exactement François retrouve les troupes du 2e RIC au front.
A-t-il vécu la terrible journée du 22 août 1914 à Rossignol, au terme de laquelle la 1ère brigade d’infanterie coloniale, très éprouvée, ne comptait plus que 400 hommes environ sur les 13 600 hommes engagés ? Il est plus probablement venu en renfort après ces terribles pertes.
Il a déjà certainement rejoint le 2e RIC, le 11 septembre, quand la 1ère brigade coloniale commence le mouvement en avant derrière les Allemands en retraite.
A partir du 25 août, la 3ème DIC se replie vers la Meuse, puis vers la Marne, en tentant de résister à la poursuite. C’est la retraite des armées françaises.
La bataille de la Marne
Le 4 septembre au soir, le commandant en chef Joffre donne ordre à toutes les armées françaises de se préparer à faire front. Du 7 au 10 septembre, la 3ème DIC participe aux combats à l’est de Vitry le François pour déloger l’ennemi retranché dans ses tranchés vers Vauclerc et Villotte.
Le 11 septembre, la 1ère brigade commence le mouvement en avant pour poursuivre les Allemands en retraite. Du 12 au 14 septembre, le corps d’armée colonial continue sa poursuite vers le nord. La 3ème DIC se dirige vers Cernay en Dormois. Le passage de la Tourbe doit avoir lieu à Ville sur Tourbe.
Le 14 septembre, vers 10h, la tête du 2ème RIC arrive à environ 200m de Ville sur Tourbe (Nord-Ouest de Sainte Ménéhould) en proie aux flammes. Elle est accueillie par une très vive canonnade, tirée par l’artillerie lourde, canonnade de plus en plus vive sur le village et sur le pont, l’empêchant de progresser pendant plusieurs heures.
En milieu d’après-midi, le commandant de brigade reçoit l’ordre de continuer le mouvement offensif. Le mouvement ne peut cependant se faire convenablement avant la nuit, le débouché du village étant couvert d’obus. Vers 19 heures, profitant de la nuit, les bataillons purent franchir la Tourbe. Ils reçurent l’ordre de continuer leur route par la lisière ouest du bois de Ville, la ferme de Touanges et ultérieurement sur Cernay-en-Dormois. les trois bataillons se perdirent dans l’obscurité et dans la forêt, et furent retrouvés vers 23 heures et ramenés à Ville Sur Tourbe.
Le 15 septembre, les attaques sont reprises à 5 heures du matin. La 1ère brigade doit reprendre sa marche sur Cernay en Dormois, et le 2ème régiment reprend l’attaque la ferme de Touanges.
Mais bientôt le bataillon de tête est obligé de suivre rigoureusement la lisière, arrêté par la batterie allemande de la cote 148. Beaucoup d’hommes tombent. Le moindre mouvement, même de groupes de peu d’importance cherchant à progresser, est immédiatement le signal d’une salve très précise. Les unités du 2ème RIC ne progressent pas.
En attendant les renforts, les troupes bivouaquent dans le bois, sous une pluie battante, sans vivres, au milieu des plaintes des blessés.
Vers 19 heures, l’artillerie française augmente la gravité de la situation en bombardant fortement la lisière est du bois de Ville.
Pendant la nuit, la 1ère brigade reçoit l’ordre d’aller se reconstituer à l’est de Berzieux. Près de 2 000 hommes de la 1ère brigade auront laissé la vie à Ville-sur-Tourbe, ce 15 septembre 1914 parmi lesquels François Mauguen.
Après son décès
Comme pour tous les soldats tués dans les premières semaines de la guerre, son décès n’est retranscrit que tardivement à la mairie de Quéménéven, le 11 janvier 1921. François Mauguen est donc d’abord considéré comme disparu. Son nom n’apparaît pas dans la liste publiée le 27 mars 1915 par La Dépêche de Brest. Dans ce court article, il est probablement inclus dans les « cinq ou six autres (qui) n’ont pas donné de nouvelles depuis le mois d’août ».
Pendant ce temps, dans la petite ferme de Talagroas, à Kergoat, sa femme Jeanne Chapalain se retrouve seule avec ses deux enfants de 4 et 2 ans et son beau-père François, tremblant pour ses frères René et Yves, et ses beaux-frères Hervé, Yves et Pierre. Si ses frères reviendront de la guerre, Pierre Mauguen sera le seul des 4 frères Mauguen à réchapper des combats meurtriers.
Sources
Registres d’état-civil de la mairie de Quéménéven
Fiche matricule aux AD du Finistère (1R-1254 – 1900)
Site Mémoire des Hommes : Fiche de François Mauguen sur la base des morts pour la France, Historique du 2e R.I.C. sur le site gallica.bnf.fr, JMO de la 15e D.I.C. et de la 1e B.I.C. sur le site Mémoire des Hommes